Les femmes haïtiennes, en particulier celles qui vivent dans les zones rurales, sont victimes de discrimination, d'exploitation et de violence depuis des générations, bien qu'elles aient joué un rôle majeur dans la lutte pour l'indépendance et la liberté d'Haïti. La discrimination à l'égard des paysannes est une caractéristique structurelle de la société et de la culture haïtiennes qui a perdurée en temps de paix et de troubles. Des groupes de défense des droits des femmes sont apparus en Haïti depuis plusieurs décennies; cependant, elles sont entièrement fondées par des femmes des zones urbaines ou des femmes élites. C'est dans ce contexte de femmes paysannes impliquées dans des organisations populaires dirigées par des hommes se sont réunies dans une communauté rurale de la commune de l'Archahaie le 8 mars 2010 pour lancer Alyans Fanm Peyizan Ayisyen (AFPA), l'Alliance des femmes paysannes d’Haïti.
En mars 2010, deux mois après le tremblement de terre qui a dévasté Haïti et causé la mort de plus de 100 000 personnes, les systèmes de télécommunication ont été gravement détruits. En conséquence, les deux premières années après le lancement de l’AFPA, il était difficile de rester en contact avec tous les membres de l’alliance qui était dispersés dans le pays. Un autre obstacle majeur était le manque de ressources financières et d’infrastructures logistiques nécessaires au fonctionnement de l’organisation. Vers la fin de 2013, la popularité croissante et l’accessibilité des téléphones intelligents et des applications de télécommunication ont contribué à renforcer notre mouvement tout en l’étendant à plus de 50 communautés rurales.
En raison de nombreux obstacles inhérents à la société haïtienne où le patriarcat a tout façonné, nos progrès en matière d’émancipation des femmes et d’égalité des sexes ont été lents mais irreversible. Les services de base (réseaux routiers, centres de santé, écoles, technologies de l’information, système de crédit) et le taux élevé d’analphabétisme chez nous ont encore compliqué les efforts de notre alliance. Cependant, en raison de la structure ouverte et décentralisée que nous avons développée et promue, nos organisations soeurs évoluant dans de nombreuses communautés rurales ont beaucoup progressé en utilisant le même cadre. L’aspect le plus intéressant de cette approche est que toutes les communautés de cette alliance disposent d’une plate-forme pour partager leur expérience les unes avec les autres. En conséquence, nous avons maintement la capacité de connaître et d’agir sur les forces et les faiblesses de tous les groupes de femmes au sein de l’alliance. Nous espérons que les technologies Internet joueront un rôle majeur dans le renforcement et l’extension de notre alliance dans les villages les plus reculés d’Haïti.